Attachez votre tuque. L’histoire que je vais vous raconter vous semblera surréaliste, mais j’en ai été témoin.

Il y a quelques années, j’ai rencontré Karine après avoir animé une de mes conférences dans Chaudière-Appalaches. Après mon passage sur le stage, Karine m’a expliqué sans grande diplomatie qu’elle « n’avait pas appris grand-chose de nouveau » parce qu’elle « avait un sens des affaires extrêmement développé ». J’insiste : selon elle…

Karine avait fanfaronné devant moi en me racontant le processus de création de son nouveau logo d’entreprise. Pour son image de marque, Karine avait fait travailler trois designers graphiques différents « juste pour voir leur style », me racontait-elle. L’entrepreneure, dont je tais ici la vraie identité, avait fait miroiter à chacun d’entre eux qu’elle le choisirait, mais qu’elle voulait « s’assurer qu’il avait compris l’essence de la demande de logo ». Karine a finalement choisi un quatrième designer, un nouveau venu en affaires, en lui montrant… ce qu’elle appréciait des ébauches des trois premiers designers!

Et je la cite : elle avait « le meilleur de chacun d’eux sans payer une fortune ». Je l’ai challengée sur sa façon de faire de la business et sa réponse a été toute simple : « Ils avaient juste à ne pas accepter de me fournir des esquisses sans signer le contrat au préalable ». J’ai trouvé ça triste qu’une soi-disant entrepreneure profite de la naïveté de trois personnes et surtout, sans aucun remords. Ils se sont fait fourr…!

Et comme si cet exemple n’était pas suffisant, Karine s’est mise à me raconter qu’elle s’organisait pour profiter de tout ce qui était gratuit sur le web, sans jamais payer pour de l’expertise. J’ai coupé court et pris congé d’elle – plus de temps à perdre. Elle ne méritait même pas que je la brasse un peu en la traitant d’arrogante et d’irrespectueuse…

Pensez-vous sérieusement qu’un entrepreneur comme Karine va changer de comportement?

Malheureusement, je le répète souvent : nous vivons une crise de professionnalisme depuis plusieurs années. J’ai l’impression que ça empire toujours chaque jour. L’utilisation des médias sociaux par des amateurs en affaires cherchant la facilité pollue les fils d’actualité, la messagerie instantanée et les boîtes courriel de ceux qui font des affaires de façon éthique.

Certaines personnes ne font que s’abreuver et consomment gratuitement tout ce qu’ils peuvent. Un peu comme des Bougon cherchant à s’abonner à tout ce qui leur permet d’avoir des échantillons gratuits et en jouant toujours plus avec les limites des autres. C’est irrespectueux.

Karine est l’exemple parfait d’une profiteuse qui nuit à la réputation des vrais entrepreneurs. En business, on les appelle les siphonneuxOn reconnaît les siphonneux dans différentes situations en affaires :

  • Leur premier contact vient généralement par courriel ou sur les réseaux sociaux; ils sont trop pissous pour prendre le téléphone.
  • Lorsqu’ils vous appellent, c’est l’urgence nationale comme si leur vie en dépendait! Et surtout, « ils comptent sur vous » pour les aider avec un conseil rapide.
  • Ils vous font perdre votre temps.
  • Ils ont l’art de vous faire douter que vous passiez à côté d’une potentielle longue relation d’affaires.
  • Ils abusent de vos conseils avant de signer un contrat – ce qui est toujours remis à plus tard.
  • Ils veulent consommer vos produits avant de les acheter. Oui, ce sont souvent des cheapos.
  • Les siphonneux sont adeptes des « appels découvertes » et ils ont un talent pour étirer un appel de 30 minutes en une rencontre d’une heure.
  • Les siphonneux n’ont aucune notion de loyauté : ils veulent tout au meilleur prix et surtout, MAINTENANT!
  • Ils prennent tout ce que vous offrez gratuitement comme des sangsues, mais n’achètent aucun de vos produits. Pire, vous découvrez qu’ils font affaire avec un concurrent pour économiser quelques dollars.
  • Lorsqu’ils consomment vos produits ou services, ils sont de mauvais payeurs. Vous vous retrouverez prisonniers d’une entente de paiement pour une facture de moins de 500 $!
  • Ils utilisent vos conseils pour gérer eux-mêmes leur problème, comme un propriétaire qui s’abreuve des conseils d’un courtier immobilier, mais qui met sa maison en vente sur DuProprio.
  • Ils pensent qu’ils sont seuls au monde, que vous n’avez pas d’autres clients et que vous attendiez impatiemment leur appel!
  • Les siphonneux vous font perdre de vue les vraies opportunités d’affaires.

Parfois, les siphonneux ne sont pas conscients qu’ils agissent de la sorte et c’est à nous de clarifier nos propres limites pour éviter de nous faire abuser par eux. Ils ne sont pas tous mal intentionnés. C’est donc à nous de les éduquer à travailler avec nous. Autrement, filtrez-les et demandez-leur gentiment d’aller voir ailleurs!

Mise en garde : on les voit aussi remonter à la surface comme des grenouilles dans l’eau par temps de pluie. Vous en verrez donc beaucoup dans la turbulence des prochains mois.

Oui, nous avons tous un jour ou l’autre agi comme un amateur. C’est normal à nos débuts, mais inacceptable si vous voulez vraiment réussir et avoir un impact durable pour les gens qui interagissent avec vous. Parce qu’on garde toujours un goût amer d’une interaction avec un siphonneux.

J’espère que vous n’agissez pas ainsi. Si c’est le cas, changez votre façon de faire de la business et évoluez. (Et si je vous ai choqué, désabonnez-vous de cette infolettre immédiatement.)

Avez-vous déjà agi comme siphonneux?