William Leclerc d’Ébénor Percussion, un des entrepreneurs vedettes de mon nouveau livre Évolution, a été très insistant envers moi lors d’un de nos récents échanges.
« Alexandre, tu ne peux pas parler de relance sans parler de diversification. Tu dois parler de l’importance de la diversification en affaires, particulièrement maintenant! »
Depuis le début de la crise, plusieurs pseudo-experts encouragent les entrepreneurs à se diversifier.
« Cherchez à vous diversifier! »
Facile à dire. Ça fait gérant d’estrade s’il n’y a pas plus de substance que ça. Comme ceux qui vous vendent l’idée que vous avez besoin absolument d’un site web transactionnel.
D’accord et ensuite? What’s next?
La diversification est une stratégie d’affaires plus complexe qu’il n’y paraît. Peu de gens connaissent réellement les différentes options de diversification en affaires, tant avec l’entreprise qu’en tant qu’entrepreneur. Et pourtant, c’est l’une des clés du succès. Particulièrement maintenant.
Le principe de la diversification repose sur l’adage « ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier ». C’est la base de la gestion de risque.
C’est suicidaire de sauter en parachute… sans parachute. Pourtant plusieurs entrepreneurs mènent leur entreprise sans avoir diversifié leurs affaires. On en a la preuve présentement…
Depuis le début de la crise, notre équipe à la Clinique d’accompagnement entrepreneurial du Québec explique aux entrepreneurs comment le faire.
Il existe trois grands types de diversification :
- Diversification de marché
- Diversification de l’offre
- Diversification des affaires
J’aborderai dans ce texte la première forme de diversification, et les deux autres seront couvertes la semaine prochaine. Une série de trois articles sur le sujet.
Diversification de marché
La diversification de son marché suppose que l’on offre exactement les mêmes produits ou services à de nouveaux clients potentiels.
Pénétration de marché
On peut le faire en commençant par cibler de nouveaux clients qui sont similaires à ceux que nous avons déjà. Par exemple, une entreprise de stratégie marketing spécialisée qui a pour clientèle des centres de ski et qui cherche à attirer de nouveaux clients de ce type.
Dans le jargon, on appelle ça de la pénétration de marché et on utilise beaucoup le référencement et les témoignages de clients satisfaits pour continuer à battre le fer pendant qu’il est chaud. Si j’ai le Mont Sainte-Anne comme client, Bromont pourrait être intéressé.
Il n’y a pas beaucoup de risque à court terme associé à cette tactique. C’est également la plus répandue en temps normal parce qu’il est confortable d’effectuer ce type de prospection. On joue dans le même carré de sable, un carré de sable bien délimité.
À long terme ou en temps de crise, ça peut toutefois se révéler désastreux. En général, les entreprises dans cette catégorie espèrent avoir des clients considérés comme essentiels pour vivre et survivre.
Les entreprises qui ont recours à ce type de stratégie doivent impérativement chercher à se diversifier. Autrement, un facteur de l’environnement externe, comme évidemment une crise sanitaire, peut venir faire tomber tous les œufs de votre panier. L’opportuniste va peut-être y voir l’occasion de faire des œufs brouillés avec un assaisonnement de poussière…
Mais ces entreprises vont en baver longtemps si elles ne cherchent pas d’alternative.
Extension de marché
Deuxièmement, on peut chercher à étendre son marché. L’extension de marché permet de monter d’un niveau dans la chaîne alimentaire des affaires afin d’élargir légèrement ses horizons de prospection en restant campé sur ses forces, sans changer sa proposition d’affaires.
Prenons l’exemple d’Ébénor Percussion. William a comme client des drummers de différents niveaux : des débutants, des intermédiaires et des musiciens qui en vivent. William peut décider de cibler plus particulièrement des groupes de musique professionnels ou des producteurs de spectacles pour fabriquer des instruments sur mesure pour ce type de marché. Il continue d’offrir le même type de produit personnalisé, mais il étend son marché à cette clientèle qui a un lien fort avec ses clients réguliers qu’il peut alors utiliser comme tremplin. Grâce à cette extension de marché, William a traversé la crise en augmentant considérablement son chiffre d’affaires.
Reprenons l’exemple des spécialistes de marketing pour les centres de ski. En remontant la chaîne alimentaire, l’entreprise pourrait chercher à ratisser un peu plus large en ciblant les entreprises du domaine des sports, des loisirs et des événements extérieurs. Plusieurs nouvelles opportunités de développement s’offrent ainsi à eux SANS avoir à modifier leur offre de service.
L’investissement en temps et en argent est nécessaire, mais pas si énorme que ça parce que les habitudes de ce marché sont sensiblement les mêmes pour ce type de service. Votre offre de service pour un centre de ski peut donc servir pour une entreprise qui offre des excursions et des randonnées en plein air.
Développement de marché
En troisième lieu, on peut décider de cibler un tout nouveau type de clientèle en lui proposant exactement la même offre qu’à ses clients habituels. Un commerce de détail qui vend ses produits à des particuliers et qui décide de cibler désormais des entreprises correspond à ce type de diversification. C’est ce que l’on appelle du développement de marché avec de nouveaux clients qui ont des habitudes d’achat et des façons de communiquer distinctes, et pour lesquels la façon de les attirer est complètement différente de ce à quoi on est habitué.
L’entreprise de marketing de centres de ski qui cherche à se diversifier en ciblant, par exemple, des entreprises manufacturières correspond à ce genre de diversification. La mise en marché est différente et ratisse plus large.
L’investissement en temps et en argent va en grandissant à mesure que l’on défriche un nouveau marché. Le risque s’accroît donc plus on s’éloigne de son centre de gravité actuel.
Dans l’ordre : Pénétration de marché – Expansion de marché – Développement de marché
Un entrepreneur proactif se diversifie AVANT d’être pris au dépourvu.
Bref, vous avez du pain sur la planche si vous désirez diversifier vos affaires.
Ne venez pas pleurer sur mon épaule le 15 novembre en vous plaignant que vous n’avez plus de clients et en jouant à la victime de la COVID-19 si vous vous permettez d’être sur une terrasse à 15 h le jeudi après-midi.
Vous avez assurément mieux à faire pour assurer le développement de votre marché.
J’aborderai la diversification de l’offre dans le prochain texte.
D’ici là, bonne réflexion.